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Gestion de Fortune - Seprtembre 2021

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L'Edito de Jean-Denis Errard

 Ligne Jaune

 L' affaire Helvet Immo n’en finit pas de défrayer la chronique. L’inventeur de cette trouvaille géniale ( !) doit s’en mordre les doigts, en tout cas sa banque, BNP Paribas, ne cesse d’en subir les consé quences depuis une décennie. Dernier épisode en date de cette histoire de 4 655 crédits immobiliers souscrits pour environ 800 M€ dans les années 2008-2009, l’arrêt que vient de rendre la Cour de justice de l’Union européenne en faveur des clients de la banque.

Franchement, il paraissait évident qu’un crédit libellé en Francs suisses et remboursable en euros faisait courir un risque de change ! Quand on veut jouer on peut perdre, a-t-on envie de dire quand on lit les dossiers de ceux qui se prétendent victimes de cette offre de la banque de tirer profit de l’écart de taux entre les deux pays (environ 100 points) ? Des victimes d’elles-mêmes ? On ne peut invoquer sa propre turpitude, enseigne-t-on à la faculté de droit1 . Mais voilà, cet aléa de parité monétaire qui à l’époque semblait purement théorique est devenu réalité en 2010 lors de la crise de confiance mondiale liée aux subprimes, ce qui a renchéri d’environ 30 % les remboursements à effectuer ! Une ruine pour beaucoup de clients.

Les juges ont tergiversé, la Cour de cassation aussi. Mais la justice euro péenne vient de rendre son verdict : coupable d’abus. Les juges civils français, dans les contentieux en cours, vont devoir maintenant s’aligner.

Le tribunal correctionnel de Paris2 , dans un jugement très argumenté (qui avait exigé 600 pages !), avait condamné la banque à une amende de 187 500 € pour pratique commerciale trompeuse. Les magistrats ont déclaré que « la sophistication du prêt, la complexité du contrat avec des clauses parfois absconses étaient telles que le fonctionnement du contrat et les conséquences du risque de change n'ont pas davantage été compris par les vendeurs eux-mêmes comme en témoignent certaines auditions ».

Les juges européens ont rendu un verdict qui raisonne comme un avertis sement général : « dans la mesure où le professionnel n’a pas respecté l’exi gence de transparence à l’égard du consommateur ces clauses semblent faire peser sur lui un risque disproportionné… ». Oui on peut y voir un avertis sement à l’heure où -et c’est toute l’ambiguïté du discours de l’ACPR qui salue le fléchage de l’épargne vers l’économie tout en mettant en garde contre l’ina déquation au profil du client- l’on distribue à tout va des produits structurés, des instruments immobiliers type SCPI et des fonds boursiers. La recherche de performance incite à l’audace certes mais la ligne jaune n’est pas loin comme le signale le coup de sifflet de l’ACPR sur des pratiques commerciales qui tendent à forcer la main du client ou à fausser le conseil en fonction du taux de rétrocommission.

1. Nemo auditur propriam turpitudinem allegans

2. Mes commentaires dans le numéro 313 d’avril 2020. Un appel est en cours