23122024

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Banque

Observatoire des fonds Lyxor : les gestions défensives limitent les dégâts

Lyxor a passé en revue le comportement des fonds d’investissement durant le 1er trimestre 2020. Pour perdre le moins possible, il fallait être très sous-exposé au risque.

Après une année 2019 exceptionnelle pour les actifs risqués, le 1er trimestre 2020 est une période « inédite ». Philippe Mitaine et Vanessa Bonjean, senior fund analysts chez Lyxor, en recensent les faits frappants. Cela n’aura échappé à personne, la propagation rapide du Covid-19 a entraîné une chute brutale des marchés à partir de la mi-février, provoquant l’un des pires « bear markets » de l’histoire boursière.

La croissance économique mondiale a fortement ralenti, causant la mise en place de mesures de confinement, ainsi que la fermeture de la plupart des usines et des entreprises. Une situation qui a poussé gouvernements et banques centrales à prendre des décisions « extraordinaires » pour atténuer la dégradation des conditions économiques et financières.

Capitulation

« Au sein des obligations, soulignent les analystes, cet environnement a conduit à une divergence extrême entre les actifs considérés comme sûrs et les actifs risqués. Le mouvement le plus marquant a été la forte hausse des obligations d’Etat américaines, le taux à 10 ans ayant chuté à un niveau jamais atteint (0,67 %), tandis que la baisse sur le taux allemand à 10 ans, déjà en territoire négatif, a été plus limitée. Les taux à 10 ans italien et espagnol ont rebondi, car l’Italie et l’Espagne ont été fortement touchées par le Covid-19 et devraient voir leurs déficits s’accroître. Le crédit a subi une chute brutale en mars, en raison d’un assèchement de la liquidité et de craintes d’abaissement des notes de crédit des sociétés. »

Les obligations investment grade et high yield ont respectivement baissé de 6 % et 14,6 %. Les interventions « rapides et massives » des banques centrales ont apporté de la liquidité sur les marchés en fin de période. Les obligations émergentes ont également fortement corrigé.

Les actions, elles aussi, ont plongé. Le marché européen a perdu 22,6 % sur le trimestre, après avoir atteint un plus-haut historique mi-février. « La dichotomie de performances entre les styles croissance et value, commentent les analystes, s’est accélérée : – 16,1 % pour l’indice MSCI Europe Growth et – 29,2 % pour l’indice MSCI Europe Value. Le marché s’est polarisé sur le thème des valeurs défensives (santé, services publics, consommation courante…) versus valeurs cycliques (énergie, finance, industrie, matériaux de base…). Enfin, les petites capitalisations ont sous-performé par rapport aux grandes valeurs.

Les flux ont reflété la « capitulation » des investisseurs sur le front des instruments de taux d’intérêt. En mars, les fonds obligataires ont subi leur plus forte décollecte historique en un mois : – 120 Md€, effaçant près de la moitié (47 %) de la collecte des 12 mois précédents, tandis que les fonds actions ont enregistré 43 Md€ de rachats mensuels. « Au sein des obligations, précisent Philippe Mitaine et Vanessa Bonjean, les sorties ont été massives sur les fonds diversifiés, avec 70 Md€ de rachats en mars (36 Md€ sur le trimestre), stoppant brutalement la très forte collecte des dernières années sur ce type de stratégies. Autre fait marquant : les investisseurs ont préféré vendre les fonds investment grade (– 15,6 Md€) plutôt que les fonds high yield (– 12 Md€). Ils ont également fui les fonds d’obligations émergentes (– 21 Md€). »

Sélection

Encore très importante chez les fonds obligataires flexibles, la dispersion a été amplifiée par des conditions de marché exceptionnelles. Bien qu’ayant diminué leur risque crédit, les fonds flexibles ont été pénalisés par la chute de mars, car ils avaient pour la plupart conservé une exposition à des obligations générant du portage dans un contexte de taux bas. Un fonds comme Jupiter Dynamic Bond [– 1,9 %] fait partie de ceux qui ont le mieux résisté, son gérant ayant depuis longtemps adopté un biais défensif (avant d’augmenter le risque crédit lorsque les marchés sont descendus vers des points bas). Pimco Global Bond a terminé le trimestre sur une performance proche de zéro. « L’équipe de gestion, relèvent les analystes de Lyxor, avait abordé l’année avec un positionnement défensif, en raison de la croissance mondiale jugée fragile et des valorisations élevées sur les actifs risqués. » BlackRock Fixed Income Global Opportunities [– 4 %] avait également commencé l’exercice avec une vue défensive.

Du côté des actions, les fonds sectoriellement spécialisés ont continué à attirer des souscriptions (+ 13,5 Md€) entre les 31 décembre 2019 et 31 mars 2020. Les fonds Etats-Unis (-13,4 Md€) et Europe (-20,8 Md€) ont, parallèlement, été délaissés. S’agissant des fonds marchés émergents, la tendance positive du quatrième trimestre 2019 n’a pas résisté à la pandémie.

Renaissance Europe est le fonds qui a affiché la meilleure performance trimestrielle relative [– 12,6 %] et ce, grâce, notamment, à une bonne représentation des valeurs de santé en portefeuille. Jupiter European Growth, qui suit une approche comparable, centrée sur la recherche de titres de croissance de qualité, a bénéficié d’une politique de gestion plutôt avisée [– 14,5 %]. Enfin, Echiquier Agenor SRI Mid Cap Europe [– 14 %] a aussi tiré son épingle du jeu, du fait de son positionnement sur le segment croissance de grande qualité et de son important volant de liquidités (18 %) à l’entrée de la crise. La période actuelle devrait renforcer l’importance de la sélection de valeurs.

ML