17052024

Retour

Marché

La proposition de loi relative au HCSF définitivement enterrée


Panorama de lhémicyle de lassemblée nationale

Lionel Causse, à l’origine du texte, l’a retiré après l’adoption de plusieurs amendements lors de son examen en séance publique à l’Assemblée nationale. Il a estimé que son projet initial de réforme, déjà considérablement remanié par la commission des finances, n’avait plus lieu d’être.

 

 

 

 

La montagne n’aura même pas accouché d’une souris. La proposition de loi portée par Lionel Causse visant à réformer le Haut conseil de stabilité financière (HCSF) a été retirée par le député Renaissance lui-même lors de son examen en séance publique à l’Assemblée nationale le 30 avril.

« Plus aucune raison d’être »

Lionel Causse a estimé que les amendements adoptés en plénière avaient porté le coup d’estoc final à son texte. « Je demande le retrait de ce texte qui n’a plus aucun sens et plus aucune raison d’être », a-t-il dit en séance.

« Le HCSF garde donc tous les pouvoirs et pourra continuer de bloquer l’accès au crédit sous des prétextes spécieux de protection contre le surendettement des ménages, sachant pertinemment que le surendettement des ménages concerne les locataires dans près de 9 cas sur 10 et s’appuyant sur la crise des subprimes de 2008 qui était liée à des produits à taux variables que la France est le seul pays à ne pas commercialiser », a déploré Maël Bernier, porte-parole de MeilleurTaux.

Les amendements visés portaient essentiellement sur l’article de la proposition de loi prévoyant que des parlementaires puissent siéger au HCSF. « Les différents groupes se sont déchirés sur la question de savoir s'il fallait 2, 4 ou 6 parlementaires au sein du HCSF, et comment seraient-ils nommés, avec ou sans la parité des sexes, avec ou sans écriture inclusive dans la rédaction de la loi, a chargé Olivier Lendrevie, ancien président de Cafpi et fondateur de MoneySmart. Ne riez pas, nous en sommes là ! »

Un texte déjà vidé de sa substance

En réalité, le dispositif principal du texte avait déjà été mis à mal dès son examen par la commission des finances de l’Assemblée nationale. Celui-ci devait permettre aux banques d’écarter les règles du HCSF qui limitent à 25 ans la durée maximale du prêt immobilier et à 35 % le taux d’effort si elles démontrent que l’emprunteur ne présente pas de risque d’endettement excessif.

L’article concerné a finalement été complètement réécrit par Lionel Causse pour laisser à la place au HCSF le soin de fixer « les conditions dans lesquelles les établissements de crédits [...] peuvent déroger » à ses règles macroprudentielles, sur proposition du gouverneur de la Banque de France, « en tenant compte des variations d’offre et de demande de crédit ». Même voté en l’état, le texte n’aurait eu qu’une faible portée puisque les règles macroprudentielles du HCSF auraient pu rester inchangées. 

Opposition des banques centrales

La Banque de France n’a jamais caché son opposition à une réforme du HCSF, arguant que la marge dérogatoire à laquelle les banques peuvent recourir pour 20 % de leur production de crédit n’a jamais été utilisée à plein. Elle avait publié le 8 avril une enquête montrant sur la période 2010-2021 une hausse de l’endettement plus forte en France que chez ses voisins européens, notamment pour les ménages aux revenus les plus élevés.

La Banque centrale européenne (BCE) s’est aussi ouvertement prononcée contre la proposition de loi de Lionel Causse. Dans un avis publié le jour de son examen en plénière, elle estimait que l’introduction de parlementaires au sein de l’instance remettrait en question son indépendance à l’égard des organes politiques en diluant la représentation des organes techniques au sein du HCSF.

La CNCEF avait annoncé préparer sa propre proposition de réforme après avoir rencontré des représentants du ministère du Logement mi-avril. Elle la leur a transmis le 30 avril. Celle-ci reprend l'idée d'autoriser les banques à déroger aux règles macroprudentielles du HCSF en fonction du reste à vivre selon les modalités suivantes : 
- jusqu’à 40 % de taux d’endettement si le reste à vivre est équivalent à 3 ou 4 Revenus de solidarité active (RSA), soit aujourd’hui entre 1 907 et 2 542 euros
- jusqu’à 45%, si le reste à vivre est équivalent à 5 ou 6 RSA, soit entre 3 178 et 3 814 euros
- jusqu’à 50%, si le reste à vivre est équivalent à plus de 6 RSA, soit plus de 3 814 euros