27122024

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Neuf : l’hémorragie continue


sang goutteLes chiffres du premier trimestre 2024 s’inscrivent dans la veine de l’année 2023. Que l’on regarde du côté des ventes, des mises en chantier ou des permis, tout s’effondre. La Fédération des promoteurs immobiliers se prépare à monter au créneau si rien n’est fait d’ici l’été.

 

 

 

  

Les mots et les maux des promoteurs se suivent et se répètent. « A chaque fois je pense qu’on a touché le fonds de la piscine, mais les chiffres continuent d’être plus catastrophiques à chaque conférence de presse », s’émeut Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) en présentant le 14 mai les chiffres du premier trimestre 2024.

Pas de frémissement

Le « frémissement », dont font état certains professionnels concernant la reprise des transactions immobilières, ne concerne certainement pas le neuf. Chez les promoteurs, tous les voyants sont au rouge.

Les mises en chantier de logements collectifs ont baissé de 23 % et ne concernent plus que 26 100 logements au T1 2024. Les autorisations, qui sont les mises en chantier de demain, plafonnent en-dessous des 41 000. « Aujourd’hui ce ne sont plus les maires qui bloquent les demandes de permis, mais les promoteurs qui n’en déposent plus », rapporte Pascal Boulanger.

Désertion des investisseurs

Pourquoi en effet construire quand l’existant ne s’écoule pas ? Les ventes de logements neufs baissent de 15,4 % par rapport au trimestre précédent. Les quelque 19 000 logements écoulés représentent le niveau le plus bas jamais observé par la FPI. Les programmes de rachats en bloc de CDC Habitat et Action Logement ne compensent pas la chute des ventes aux particuliers, qui diminuent de 26,8 % sur un an pour se maintenir tout juste au-dessus des 12 000 logements.

Les investisseurs ont quasiment déserté le marché du neuf : ils avaient acheté 11 000 logements au T1 2022, ils n’en ont acquis que 5 900 au T1 2023 et seulement 3 600 ce trimestre. Les délais d’écoulement des offres commerciales ont plus que doublé en deux ans : un promoteur doit maintenant attendre en moyenne plus de 22 mois avant de trouver un acquéreur. Aucun logement n’est vendu en moins d’un an dans les métropoles et à Lille, il s’écoule même quarante mois.

Pas d'effet sur les prix

Faute d’acquéreurs, les mises en ventes continuent de se tasser, à 11 600 au T1 2024. C’est 40 % de moins sur un an, et même ramenée à l’année 2020 secouée par la pandémie, on observe une chute dans des proportions comparables. A tel point que la FPI prépare une nouvelle statistique sur les retraits de programmes, beaucoup n’atteignant pas les quotas de réservations nécessaires pour que la mise en chantier ne démarre.

Si la crise nourrit la crise, elle ne produit pas d’effets notables sur les prix. Le prix au m², après avoir entamé une décrue en 2023, augmente légèrement en 2024 (5 169 €), le différentiel étant contenu dans un mouchoir de poche. Les promoteurs, majors en tête, préfèrent licencier plutôt que de rogner sur des marges déjà faibles.

Pour la FPI, c’est la preuve que la contraction du marché ne produira pas d’effet sur les prix du neuf et qu’il faut agir, en urgence. Selon ses estimations, 300 000 emplois sont menacés : celles-ci sont calculées à partir d’un manque de 150 000 logements par rapport à une année normale et du fait qu’un logement génère deux emplois pendant la durée du chantier.

Mise en garde

Bien que la fédération soutienne politiquement le ministre et ait voté en faveur de sa loi sur le logement au Conseil national de l’habitat (CNH) - qui l’a par ailleurs rejeté à la majorité - elle qualifie le texte d’ensemble de « mesurettes qui ne sont pas à même de faire face à la catastrophe ».

« Pour le moment, nous soutenons le ministre car nous avons l’intime conviction qu’il a compris nos difficultés. Mais l’état de grâce des 100 premiers jours [après la prise de fonction NDLR] est en train de passer, prévient Pascal Boulanger. Nous n’attendrons pas septembre en regardant nos entreprises sombrer sans réagir. » L’été sera chaud.