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Des notations ESG bientôt plus transparentes, mais toujours non harmonisées


esg durabilité vertLes agences, qui passaient jusqu’ici entre les mailles de la réglementation, devront à partir du 2 juillet 2026 respecter un ensemble de règles européennes pour lever le voile sur leurs méthodologies afin d’améliorer l’information des investisseurs… sans imposer pour autant la comparabilité.

 

 

 

 

 

Le règlement européen sur les agences de notation ESG, publié au Journal officiel de l’Union européenne (UE) du 12 décembre, vient combler l’un des derniers angles morts de la finance durable.

Les agences établies sur le territoire communautaire devront, à partir du 2 juillet 2026, se conformer à des exigences de transparence au bénéfice de l’investisseur. Ces sociétés devront être agréées et surveillées par l’Autorité européenne des marchés financiers (Esma) et détailler les méthodologies qu’elles utilisent pour parvenir à leurs notations ainsi que leurs sources d’information.

Transparence exigée

« La transparence porte sur l’objectif de la notation (utilisation ou non du principe de double matérialité), son périmètre – si la notation est agrégée, la note et la pondération par pilier… -, la description des méthodologies utilisées, l’horizon temporel, la source des données et la classification sectorielle de l’entité notée », précisait il y a quelques mois dans nos colonnes Claire Guillaumot, directrice de la régulation des émetteurs au sein de la direction régulation et affaires internationales de l’AMF.

Les gérants et les intermédiaires qui utilisent des notations ESG à des fins marketings devront respecter la même pédagogie dans la documentation commerciale de leurs produits.

Les notations ESG des fournisseurs dont le siège est à l’extérieur de l’UE devront être avalisés par une agence agréée par l’Esma, obtenir une reconnaissance fondée sur un critère quantitatif ou une inscription au registre des fournisseurs de notations ESG de l’UE sur la base d’une décision d’équivalence.

Les agences n’auront pas l’obligation de créer d’entité juridique distincte pour leurs activités commerciales - excepté en ce qui concerne l’audit ou la notation de crédit - mais devront mettre en place une séparation claire et des mesures visant à éviter tout conflit d’intérêt.

Sans entraves

« Les nouvelles règles visent à renforcer la fiabilité et la comparabilité des notations ESG en améliorant la transparence et l'intégrité des activités exercées par les fournisseurs de notations ESG et en prévenant les conflits d'intérêts potentiels », vante le Conseil de l’Union européenne dans un communiqué.

Si la comparabilité est l’un des objectifs avoués du texte, il ne se donne en rien les moyens de l’imposer aux agences, de peur de nuire au développement du marché. « Les États membres ne réglementent ni ne surveillent les activités des fournisseurs de notations ESG, ni les conditions de la fourniture des notations ESG, tranche le règlement. Compte tenu des divergences existantes, du manque de transparence et de l’absence de règles communes, il est probable que les États membres adopteraient des mesures et des approches divergentes qui entraveraient la réalisation des Objectifs de développement durable et des objectifs du Pacte vert pour l’Europe. »

Les institutions européennes pointent de façon paradoxale le risque de créer des « conditions de marché inégales » pour les utilisateurs de notation et d’ériger « des obstacles supplémentaires » au risque de « fausser les décisions d’investissement ».

Fournisseurs de données, le dernier de non-régulés

Un risque qui existe pourtant tout autant en l’état actuel des choses, tant les méthodologies sont disparates : une étude de 2019 réalisée par le MIT Sloan School of Management constatait que la corrélation des notes attribuées par Sustainalytics et MSCI n’était que de 40 % sur l’extra-financier, contre 99 % sur les ratings obligataires.

De nombreux acteurs réclament maintenant que les fournisseurs de données ESG, soit l’entité du scope financier la plus en aval des informations sur la durabilité des émetteurs, soient également régulés. « Le champ d’application du règlement concerne les notations ESG, c’est-à-dire les opinions ou scores basés sur un système de classification, mais n’inclut pas à ce stade les produits de données ESG qui ne représentent pas une notation, ce que nous regrettons à l’AMF », nous confiait Claire Guillaumot.

(1) Règlement (UE) 2024/3005 du 27 novembre 2024 sur la transparence et l’intégrité des activités de notation environnementale

(2) « Aggregate Confusion: The divergence of ESG Ratings », lorian Berg, Julian F. Koelbel, et Roberto Rigobon